Parmi les trompettistes/cornettistes contemporains oeuvrant dans le domaine post-miles davisien inféodé à l’électroacoustique, le chicagoan Rob Mazurek (résidant aujourd’hui au Brésil) demeure une référence incontournable qui nous change de certaines Truffazeries saluées plus que de raison. Avec ce nouveau quintet au sein duquel figurent d’éminents piliers de la scène indie rock et avant-gardiste new-yorkaise (le bassiste Matthew Lux d’Isotope 217 et Iron and Wine, le contrebassiste et pianiste Josh Abrams de Town and Country, le batteur John Herndon de Tortoise, le vibraphoniste Jason Adasiewicz de Loose Assembly, membre aussi de l’Exploding Star Orchestra), Mazurek témoigne d’une inspiration volontiers onirique, succession d’ambiances entre chien et loup et de textures hypnotiques entrecoupées de sautes de tempo. Ce qui sourd tout au long de Sound Is n’est rien moins qu’une idée du son devenue matière, une matière brumeuse et flottante, en proie à des perturbations intrinsèques, des chamboulements soudains qui font que la tension et l’attention ne retombent jamais durant les 71 minutes contenues dans cet album aux couleurs urbaines et nocturnes. Le jazz vient ici insuffler cette part de risque et d’imprévu sans quoi cette musique noctambule, aux atours cinématiques, se déposerait tels des lés de papier peint sur les murs d’un imaginaire paresseux. Bien au contraire s’improvise sur Sound Is, moins une fusion, qu’une diffusion indivisible de sonorités éparses, tantôt l’attente, tantôt tendue, entre résurgences de mélodies pop, dérives électroniques planantes, motifs acoustiques clairsemés et dynamiques élastiques, parfois conduites au bord du free. Le fascinant territoire ainsi façonné, où le crépuscule se fait doucement nuit, et la nuit éclaire l’insondable mystère du son, libère la voix soliste du leader dont la pléthore de timbres suggestifs et d’inflexions poétiques sculptent, sinon magnifient cette musique de l’intérieur.

– En écoute : « The Earthquake Tree »

– Le site de Rob Mazurek
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