Il existait autrefois un monde où la magie n’était pas de la magie, effet de surface, illusion perçue et comprise en tant que telle. Elle avait une réalité concrète, rendant les gens vulnérables ou les tenant à l’affût d’un malheur. On notait les paroles, les rituels, et les rassemblait dans ce qu’on appelait le grimoire, ouvrage interdit, considéré comme anathème par l’église. Fascinants objets, ils font aujourd’hui le récit d’un monde affranchi des distances, de l’égo et des différences. On peut dire que Le « Grimoire » du musicien belge Pepijn Caudron aka Kreng est de ceux-là, digne, couvert de mystère et de poussière. Résonances, battements, sonorités minimales, côtoient des notes baroques, mondes qui s’interpénètrent sans affront, où “Le Bateleur” peut s’approcher aisément du “Ballet Van De Bloedhoeren”. L’univers musical de Pepijn Caudron semble être occulté, ouvertement, mais il n’en est pas pour autant obscur ; saturé d’harmonie, d’attente, des pleurs et des murmures, il est davantage organisé comme un macrocosme de douceur et de gravité. En passant de morceau en morceau, on se rend vite compte qu’il est hautement évocateur et riche en images, à la manière des galeries qui se suivent. Mais Grimoire s’écoute et se donne surtout comme une évasion, en incarnant sa propre libération. Sa magie est là, justement, où sa prose devient la nôtre, se dissimulant subrepticement dans nos pensées, comme un chuchotement curieusement familier.

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A écouter : « Le bateleur »