La charmante bassiste des cultissimes Luna s’essaie en solo, et n’oublie pas de distiller son charme entre reprises et compositions originales.  

 




On a d’abord fait sa connaissance au début des années 2000 en tant que charmante bassiste des cultissimes Luna. Puis lorsque le groupe new yorkais s’est séparé, elle a partagé le micro avec son époux Dean Wareham (pilier de Luna et bien avant la comète Galaxie 500), au sein du duo glamour Dean & Britta. C’est tout naturellement que nous retrouvons aujourd’hui Britta Phillips sous son propre nom. Un premier album solo à la gestation douloureuse : les sessions d’enregistrement ont commencé en 2012, mais la mort abrupte du producteur et DJ Scott Hardkiss (à l’âge de 43 ans)  plongèrent le projet dans les limbes. Ce n’est qu’en 2015 que Britta Phillips trouve le courage de retourner en studios pour finir l’album, cette fois épaulée du producteur Eric Broucek ( LCD Soundsystem, Eleanor Friedberger). Quant à son compagnon, Dean Wareham, il participe à l’ouvrage sur six morceaux.

Loin de la luxuriance pop des albums de D&B arangés par Tony Visconti, Britta Phillips a choisi une approche plus synthétique et minimaliste, d’où le choix porté sur des producteurs affiliés à la mouvance electro. Luck Or Magic distille ainsi un parfum synth pop organique, où la séduction opère facilement. Sur les dix titres, la moitié sont des reprises, de l’autre des compositions originales signées par madame Wareham. Un choix de reprises triées sur le volet (on suppose dans la collection de vinyles de son époux érudit), chose guère étonnante si on est familier des albums de Dean & Britta. Soit ici les Beach Boys, Fleetwood Mac, The Cars… et quelques pépites obscurs tel ce tube disco oublié « Wraps your arms around Me » de l’icône suédoise Agnetha Fältskog (post Abba), ou encore la ballade folk « One Fine Summer Morning » enregistré en 1968 par l’obscure Evie Sanders. 

Comme souvent dans cet exercice, les reprises ne surpassent pas les originales (il faut dire aussi que la plupart des originaux sont intouchables), mais l’ensemble ne manque pas de charme, la voix sensuelle et sucrée de Britta Philips y étant pour beaucoup. Notamment sur “Drive”, énorme tube new wave crève-coeur des Cars (chanté originellement par le bassiste Benjamin Orr et non par Rick Ocasek) et puis “Lady”, joyaux pop méconnu composé par Dennis Wilson, une des plus belles et bouleversante de la fratrie Wilson. La bassiste de Luna leur fait honneur en se faisant plaisir avant tout, et le plaisir devient réciproque.  Quant à sa nouvelle casquette d’auteur, elle nous surprend agréablement lorsqu’elle s’écarte de son pré-carré dream pop (les oniriques « Daydream « et « Do it Last », nous endorment un peu façon Lana Del Rey). Comme sur le rayonnant et irrésistiblement soul « Luck or Magic », ou ce « Ingrid Superstar », qui file la banane (certainement par l’influence de Nico dans la voix)  et où les arpèges bucoliques d’une vieille connaissance, le guitariste Sean Eden (Luna, Elk City) tirent sur notre corde sensible…

Si on peut légitimement penser que l’intérêt du disque repose avant tout par les reprises, la bassiste/songwriter s’en tire finalement honorablement par ses propres moyens. Un disque léger et faussement désuet, idéal pour flâner en cette saison estivale.

Double Feature Records – 2016
Producteurs : Scott Hardkiss/Eric Broucek
Tracklisting :

  1. Daydream
  2. Do It Last
  3. One Fine Summer Morning (Evie Sands)
  4. The Million Dollar Doll
  5. Drive (The Cars)
  6. Fallin’ In Love (Dennis Wilson)
  7. Luck Or Magic
  8. Landslide (Fleetwood Mac)
  9. Wrap Your Arms Around Me (Agnetha Fältskog)
  10. Ingrid Superstar

Sur le web : brittaphillips.com