En bonne âme et conscience, prévenons que cette chronique se passera de toute objectivité. Et pour cause, nous sommes tout bonnement incapables de prononcer la moindre mauvaise critique à l’égard les Trash Can Sinatras. Et oui, nous les aimons, ces beautiful losers écossais. Héros très discrets, les Trashcan Sinatras ont essuyé tellement de coups durs au cours de leur longue carrière — débutée à l’orée de la brit pop des années 90 — que leur existence en 2009 tient à elle seule du miracle : successions de banqueroutes de maisons de disques, tournées annulées, silence radio de huit années… Le groupe avait pourtant tout pour que le succès frappe à sa porte. Un chanteur et parolier exceptionnel en la personne de Davy Hugues, une désespérance élégante, un don inné pour les mélodies crève-coeur. Et un chef-d’oeuvre, le poignant I’ve Seen Everything (1993), sorte de Funeral maudit des années 90. Question de mauvais timing ? Même pas, les Sinatras n’ont jamais correspondu à un format dans l’air du temps. In The Music donc, parce que après avoir enduré toutes ces péripéties, la seule motivation qui reste est la passion pour la musique. Cinq ans après avoir signé Weightlifting, beau et heureux disque du retour, ce cinquième opus est son parfait prolongement. In The Music incarne une pop de soie, la meilleure étoffe qui soit, de celle fabriquée avec une patience de centenaire (on exagère, mais si peu). Une collection de ballades hyper sensibles, ou dirons-nous, plutôt, de complaintes mélancoliques d’une profondeur inouïe. Plus personne n’écrit des pop songs aux textes aussi clairvoyants et, surtout, plus Morrissey. Dès “People”’, cette poésie mélancolique mêlée de candeur interpelle (« we’re people equal in the flesh and blood, equal in the eyes of love, I feel like i’m one of them »). Pour cette grâce innée (les dépassements “Prisons”, “Oranges and Apples”) et ces arpèges comme on en entend plus que dans les vieux vinyles de soul music (“Should I Pray”, avec Carly Simon au c[h]oeur), ces dix titres se font dépositaires en nous d’une tendresse particulière. Les moments heureux sont simples et ces messieurs de coeur l’ont bien compris. Les Trashcan Sinatras respirent la musique.
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