Qu’est-ce qui fait que certains albums s’immiscent plus que d’autres dans notre quotidien alors qu’on ne les attendait pas ? Réponse avec Notes On Sunset d’Hobotalk.


Pourquoi certains films « mineurs » nous touchent autant que des classiques ? Pourquoi, sur les disques, certaines faces B vieillissent mieux que les faces A ? Il y a des oeuvres, comme ça, qui bouleversent des hiérarchies établies en entrant dans notre vie par la petite porte. Peut-être parce qu’elles tombent au bon moment et qu’elles remuent en nous des choses indicibles. Notes on Sunset, deuxième disque des sages Ecossais de Hobotalk, a cette vocation. A priori bien troussé mais sans génie, élégant sans être flamboyant, ce pourrait être le genre de disque de saison qu’on oublie vite et, pourtant, là il reste comme un ami fidèle. Car, de ses couleurs automnales, il émane une chaleur douceâtre, une plénitude aussi, comme un refuge familier.

La méthode de ces charmeurs des Highlands ? Une musique intemporelle, écrite de façon artisanale, sur des guitares acoustiques bichonnées par des propriétaires scrupuleux, et enregistrée à l’aide de matériel vintage (culte du son ou manie de collectionneur ?). Pas d’effets ostentatoires, pas d’ajouts encombrants, mais un état d’esprit : celui d’exalter la vérité nue des mélodies et l’éloquence des silences qui les ponctuent. Le résultat donne une collection de ballades douces-amères aux accents folk et bluesy, petites vignettes tantôt pluvieuses, tantôt ensoleillées qui mettent en valeur la finesse des compositions et la magie des voix.

Dans sa simplicité, Hobotalk fait montre d’un talent d’orfèvre forgé au contact de multiples influences anglo-saxonnes : pickings de guitare empruntés au répertoire celtique contemporain (« Half Your Life Away », « Book of Life »), mélodies catchy qui musardent joyeusement sur les plages de la côte ouest américaine (« Letter From A Friend », « Give Your Heart »), piano cristallin pop (« In The Arms of Love », Headstroms ») ou encore, un ragtime de bordel (« On the Edge Of Nowhere »)… soit une palette musicale riche et sensible, propre à explorer les replis de l’âme humaine.

Parlons aussi des grandes lignes de force qui structurent cette toile impressionniste d’un nouveau genre. Il y a d’abord la voix magnifique de Marc Pilley, gorgée de soul blanche, proche de celles de Tom McRae et de David Gray pour ne citer que ses contemporains. Puis, il y a ce génie de la phrase mélodique lumineuse (« Me and My Mountain », si ça n’a pas la beauté d’une chanson de Neil Young quand même !) et enfin, des refrains entêtants, habillés de choeurs discrets, capables à eux-seuls de faire basculer les compositions dans une autre dimension sur une simple note ou un changement d’accord. Exemple criant de vérité sur l’entame du disque, « Little Light », qui n’aurait l’air de rien sans cette clameur déchirante venue de nulle part au beau au milieu du morceau (« Let me be a better man »). On frissonne encore devant tant de beauté et d’impudeur mêlées.

Chez Hobotalk, tout respire l’amour du travail bien fait. Les musiciens s’appliquent, par petites touches légères de piano, de wurlitzer, de guitare et d’harmonica, à créer des ambiances subtiles caressant les mélodies, toujours avec un feeling de bluesman. On pense souvent à la pop feutrée des Belges de Zita Swoon,, parfois à celle, plus claire, de Ron Sexsmith. Enfin, avouons-le, un groupe qui cite en référence Carole King, Tin Pan Alley et John Fahey, mérite amplement d’être salué dans ces colonnes !

Une bien belle manière de cultiver sa mélancolie en toute saison…

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