Toujours aussi pénétrant, le troisième album du marquisien en chef, Jean-Sébastien Nouveau, n’a pas son pareil pour nous promener dans des climats instables et oniriques. Chronique d’une nuit dans le jardin du bien et du mal.


 

A la sortie du second album des Marquises, Pensée Magique en 2014, nous évoquions la rencontre improbable entre Robert Wyatt et Throbbing Gristle tissant ensemble des noeuds atmosphériques tendues et étouffants, le tout sous l’impulsion de rythmes cannibales pénétrants. Trois ans plus tard, notre avis n’a pas changé et pourrait tenir sur leur nouvel album, A Night Full of Collapses. Sauf que cette même cérémonie auquel nous convie aujourd’hui le marquis “sad” Jean-Sébastien Nouveau, s’est densifiée et se drape d’un voile nocturne au charme capiteux.

Brouiller les codes

Depuis le premier album des Marquises, le multi-instrumentiste lyonnais (ex Immune) cultive son univers intrigant au-delà des frontières musicales, piochant sa matière aussi bien dans l’art, la littérature que le cinéma. Lost lost Lost (2010) puisait son ainsi inspiration dans les toiles art brut de Henry Darger, tandis que Pensée Magique se revendiquait des expéditions cinématographiques de Werner Herzog, entre autres… A Night Full Of Collapses se réclame aujourd’hui de David Lynch, comme on le sait cinéaste de la nuit et des cauchemars.

Sur cette nouvelle virée nocturne, les Marquises nous plonge ainsi dans un noir profond, un monde de solitude propice à l’introspection et au mystère. On ne saurait dire si les climats déroulés sont hostiles ou hypnotiques, peut-être bien les deux. Ce qui est certain, c’est qu’en dépit de cette obscurité, et de ce sentiment de temps dilaté, cela grouille de sons : Souleymane Felicioli (trompette), Julien Nouveau (violoncelle), Martin Duru (Immune – claviers, arrangements) et le batteur et percussionniste Jonathan Grandcollot, déjà de l’aventure précédente, sont rejoints par de nouveaux venus. Notamment l’Anglais Matt Elliott au chant (pionnier de l’electro folk gothique au sein de The Third Eye Foundation), la violoniste Agathe Max (Ofield, Farewell Poetry), le pianiste Christian Quermalet (The Married Monk), le contrebassiste Jeff Hallam (Dominique A), le claviériste François Clos, et Louis Montmasson (marimba).

Mélodies rampantes

C’est peu dire que l’équipe orchestrée par Jean-Sébastien Nouveau (chant, claviers, guitare, percussions, boîte à rythmes) construit un univers dense où la perte des sens et le saut dans l’inconnu devient une discipline vitale. Un monde de dissonance, difficile à ranger dans des cases, où la pop, le jazz et autres collages atmosphériques se télescopent. On retrouve toutefois les fondamentaux des deux albums précédents, à savoir un environnement une transe inquiétante, des mélodies rampantes, où la respiration passe parfois par des percussions (le tribale et onirique « The Beguiled »).  Des mélodies plus claires peuvent aussi s’extirper de cette toile abstraite, comme sur le superbe « Following Stranger », “Des Nuits’, mini-symphonie anxiogène que n’aurait pas renié Radiohead,  « Feu Pâle » avec ses guitares à la Timber Timbre (autre maître des atmosphères “Lynchienne”, en plus pop on en convient)  où  Matt Elliot se révèle en crooner ténébreux.  “Comment ne pas résister là ou la vitesse m’éloigne” chante Jean-Sébastien Nouveau sur Vallées Closes. En effet, le pouvoir d’attraction de A Night Full of Collapses  est troublant. Rare sont les disques dont on se laisse entraîné avec une confiance aveugle sur des pistes imprévisibles. C’est certainement là le pari le plus réussi des Marquises.

 

Ici d’Ailleurs – 2017

Website : lesmarquises.net

Facebook : facebook.com/LesMarquisesBand

Tracklisting  :
  1. Vallées Closes
  2. Lament
  3. Feu Pâle
  4. The Beguiled
  5. A Forest Of Lines
  6. Following Strangers
  7. Des Nuits
    8. The Passing
Concerts : 

15/02/17LYON,
Club Transbo, Release Party (French Kiss), avec Agathe Max + invités
Gratuit sur réservation

17/02/17ANNECY,
Bonlieu Bibliothèque, Festival Hors Pistes (Soirée Label Ici d’Ailleurs)
Gratuit