La livraison annuelle du groupe mythique de Bob Pollard vient de d’arriver et reste plus inspirée que jamais. Quinze morceaux de pure indie rock qui ne révolutionnera pas le genre mais devrait laisser quelques traces en matière de songwriting imparable. Dernier détail et non des moindres, le qualitatif semble avoir pris le pas sur le quantitatif et c’est donc une bonne chose pour nous.


Arrivée la saison de l’été, Robert Pollard and co larguent traditionnellement un nouveau Guided By Voices à la face du monde, puis s’ensuit une tournée estivale marathon traversant d’Ouest en Est les Etats-Unis. Une machine bien rôdée qui avec le temps surprend toujours par sa constance métronomique et prolifique.

Prolifique, c’est bien le mot. Le terme aura fait la renommée du groupe et certainement aussi son talon d’achille. Avec près de 20 chansons par albums (Record battu pour Alien Lane en 1995 qui en contenait 28), GBV irrite et impressionne à la fois. Pour étoffer les propos, le groupe en remettra une couche en novembre prochain avec la parution du troisième coffret de sa carrière intitulé Hardcore UFO’s et regroupant six CDs dont un Greatest-hits, un DVD du documentaire de 1998 Watch Me Jumpstart, une compilation de raretés, singles introuvables et autres b-sides ainsi que la réédition du premier EP de l’histoire groupe Forever Since Breakfast (1986), très prisé des collectionneurs. Sincèrement, je plains le fan de la première heure qui doit aligner son porte-feuille bien fournit si il veut rester dans le coup. Et je ne vous parle même pas des projets annexes de Robert Pollard et de ses musiciens, ni de ses bootlegs vendus exclusivement sur leur site Internet.

Même si nous n’avons pas acheté tous les albums de l’ancien instituteur de Dayton pour cause de compte en banque qui tire la langue, c’est avec un certain plaisir que l’on écoute un nouvel arrivage. Car après 20 ans de bons et loyaux services, Guided By Voices reste le dernier pachyderme avec J-Mascis à entretenir un certain esprit irréductible dans le paysage rock indé US.
Exit Bob Mould, Pavement, Sebadoh… Guided by voices a sû résister aux modes et conserver une formule diablement efficace : des guitares noisy au service d’un songwriting inspiré. Et même si Pollard ne met pas à chaque fois dans le mille, tous les albums des Guided By voices méritent leur pesant de cacahuète. On a appris à faire son tri au bon milieu de ce vivier et établir sa propre compilation qui talonne dans nos rêves les plus fous un Surfer Rosa, New Day Rising ou Pleased to meet you.

Enregistré au début de l’année au Cro-magnon studio dans leur repaire de Dayton (Ohio) avec le producteur Todd Tobias (encore une fois crédité pour l’athmosphère!), Earthquake Glue est à ranger parmi les meilleures albums du groupe. Une fois de plus, le chef d’oeuvre n’est pas au rendez-vous, mais on constate une quantité supérieure de bons titres par rapport aux antécédents. Déjà, l’album est condensé en une quinzaine de titres et permet de ce fait une meilleur écoute. « My Kind Of soldier », le superbe single qui ouvre l’album a été enregistré en avril dans les studios de Steve Albini à Chicago et inclus in-extremis sur l’album.

Le travail effectué sur ce dix-neuvième album (!!) rappelle les illustres Bee Thousand et Alien Lanes avec un son bien meilleur. Une période charnière pour le groupe qui signait alors chez Matador après un long activisme underground. « My Kind of soldier » illustre parfaitement le contenu de l’album : un refrain entêtant emporté par les guitares géniales de Doug Gillard et Nate Farley qui n’ont toujours pas rendu les armes. On retrouve aussi cette note psychédélique si cher au groupe sur des titres comme « I’ll Replace You With Machines » ou le son de la six-corde est noyé dans un flanger qui ne semble jamais s’arrêter.

Des titres comme « The Best of Jill Hives » démontrent que Robert Pollard est loin d’avoir abattu toutes ces cartes et restent toujours en quête de la meilleur chanson rock du monde. A mi-chemin entre Lennon et Bob Mould, sa voix n’est certe pas la plus originale du circuit, mais contient assez de sincérité et d’émotion pour nous embobiner à chaques fois.

Comme à l’habitude, certains titres séduisent plus rapidement que d’autres, si bien que lorsqu’on pense avoir épuisé les ressources de l’album, une nouvelle chanson émerge du lot et relance l’intérêt. C’est ce qu’on appelle l’effet à retardement.

Enfin, pour ne pas faillir à la rêgle, j’ai fait ma sélection perso de titres efficaces, soit dans l’ordre :

The Best of Jill Hives

My Kind of Soldier

My Son, My Secretary, My Country

Beat Your Wings

Useless Inventions

Dead Cloud

Main Street Wizards

Mix Up The Satellites

Secret Star

Of Mites and Men

soit une dizaine de titres sur quinze, GBV vient à nouveau de remplir son cota avec succès. Bien joué.

– Le site de Guided by Voices