Ladies and Gentlemen We Are Floating in Americana !


« C’est la vie », say the old folks. ∗
Le nashvillien Matthew Houck (alias Phosphorescent), la quarantaine sonnée et grand admirateur de Willie Nelson a décidé de prendre la vie du bon côté. Son septième album sous l’entité Phosphorescent est un témoignage de ses cinq dernières années. Un disque d’adulte où l’on ne perçoit pas forcément les conséquences d’une période très difficile (le songwriter américain a dû se battre contre une méningite foudroyante) mais où rejaillit par contre un grand bonheur (il a officialisé sa relation avec l’instrumentaliste Jo Schornikow avec laquelle il a fondé une famille où 2 marmots vigoureux réclament régulièrement la béquée).

Quelle belle trouvaille… que cet adjectif phosphorescent pour qualifier sa formation. Mais sa musique est-elle si lumineuse que ça ? Notre plaisir sera-t-il durable ? Depuis 2013, et dans un style country-rock classique Matthew Houck appose sa touche : elle est enivrante, habitée, intimiste et cela fait toute la différence.
2013 est une date charnière pour l’américain : un cinquième LP (Muchacho) le verra intégrer la division supérieure et engranger un succès public significatif. Il y a dorénavant un avant et un après Muchacho (ou plus directement un avant et un après “Song For Zula” chanson ultérieurement vampirisée par la publicité). Cet opus réussissait le pari d’alterner séquences country-rock traditionnelles (avec une utilisation marquée de la pedal -steel) et passages plus électroniques. Le synthétiseur jonglait avec la pédal-steel  guitare, les bongos ou la trompette se mélangeaient subtilement avec les guitares électriques et la basse, le tout était chapeauté par la voix intense et passionnée de Houck. Un disque de country-rock richement émotionnel.

Pour encaisser et digérer ce succès Houck va prendre la route durant 8 longs mois. Un copieux album (triple LP) –Live at the Music Hall- enregistré au Music Hall de Williamsburg à Brooklyn (sa localisation de l’époque) verra logiquement le jour dans la foulée. On y entend un musicien aguerri et mystique.
En 2018 Matthew Houck est ailleurs, relocalisé dans la mythique Nashville il possède dorénavant son propre studio d’enregistrement – Spirit Sounds – bâti sur les ruines d’un vieux garage. C’est La Vie est le résultat de tout ce grand chambardement.

Un retour à la vie aussi, dont on mesure rapidement les effets, dès le troisième morceau en fait, où Houck ose le plaisir rythmé ou l’incursion vers les influences et rythmes africains. L’enlevé et exotique “New Birth In New England” respire la joie de vivre. Le percussionniste David Torch et ses congas s’en donnent  à cœur joie et réveillent le tempo. Une maitrise parfaite des codes en réalité.
Soit dit en passant on aurait pu détecter ces changements dès l’entame : quelques cris salvateurs, un clavier élégiaque, l’atmosphère était plantée. On l’interprète toujours comme une forme de renaissance sauvage ou bien la découverte d’un nouveau monde. La lune est noire et les vagues sont argentées (“Black Moon ; Silver Waves”). Puis très posément “C’est La Vie n°2” pointe le bout de sa mélancolie et vient se nicher aux antipodes de la country-rock. Construite sur des nappes de claviers célestes cette mélodie nocturne laisse travailler la voix enchanteresse de Houck.

Badaboum, “Around the Horn” lui ne tourne pas autour du pot ; titre le plus musclé de l’album et haut la main il développe sur plus de 8 minutes une montée en puissance hyper convaincante construite autour d’une batterie métronomique. L’orgue électrique (farfisa), la guitare et la basse électrique se fusionnent dans un maelström sonore que ne renierait peut être pas Jason (pas celui du vendredi !).
Mais bien vite de petites merveilles calment nos ardeurs. “Christmas Down Under” exfiltre son tempo langoureux tout en haut, la voix de Houck passée au vocoder palpite merveilleusement et fait écho à la pedal-steel guitare ; “My Beautiful Boy”, petite douceur aux angles arrondis par quelques nobles instruments (guitare classique, acoustique, pedal-steel, Mellotron ou piano) et dédicacée à son jeune enfant est juste magnifique. Un petit instrument d’Afrique subsaharienne – le mbira («destiné plutôt à des manifestations intimes en accompagnement du chant») participe à ce sensible témoignage. C’est l’instrument idoine en de telles circonstances.

Bien moins lyrique que par le passé l’ex brooklinois Mattew Houch n’a pas raté la marche à l’entrée de son nouveau studio. Cette production ‘fait maison’ finalement très pop est un récital de belles harmonies et de bonnes vibrations. C’est sa vie du moment.

∗(Chuck Berry / ‘’You Never Can Tell’’)

Dead Oceans – 2018

https://www.facebook.com/Phosphorescentmusic/

https://deadoceans.com/records/cest-la-vie/

Tracklisting :

  1. Black Moon / Silver Waves
  2. C’est La Vie No.2
  3. New Birth In New England
  4. There From Here
  5. Around The Horn
  6. Christmas Down Under
  7. My Beautiful Boy
  8. These Rocks
  9. Black Waves / Silver Moon